QU'EST-CE QU'ÊTRE AMOUREUX? Février 2008

Amoureux : qui aime par amour, éprouve de l’amour, de l’affection pour quelque chose.

Amour :
- tendance de la sensibilité qui nous porte vers un être ou un objet reconnu ou ressenti comme bon (amour maternel, amour des richesses) ;

- inclination pour une personne sous toutes ses formes et à tous les degrés, de l’amour-désir (inclination sexuelle), à l’amour-passion (égoïste et possessif, qui poursuit l’autre comme un objet à dévorer) et à l’amour-sentiment (altruiste et authentique, action vers…) ;

- affection réciproque entre deux personnes incluant aussi bien la tendresse que l’attirance physique. 
 

S’enamourer : devenir amoureux.

Caractéristiques de l’énamourement :

      -     il s’impose à nous, est le plus fort, nous emporte dans un monde merveilleux.

 -   Il nous fait croire que nous aimerons pour toujours « jusqu’à ce que la mort nous sépare ». 

- « je suis toi, tu es moi », substance commune, fusion entre l’amant et l’être aimé ;

 Mythe d’Aristophane, PLATON Le Banquet.

   - amoureux convaincu de mieux connaître l’être aimé qu’il ne se connaît lui-même.

- lui trouvons des excuses, défauts aimables, même si il nous traite mal.
 

-    persuadé que si nous réussissons à le toucher, il pourrait changer.

-     projet d’une vie à deux, « moi » qui devient « nous ».

Conditions de l’énamourement :

-    aspiration à une existence nouvelle, « maturation » produite par l’énamourement, car insatisfaction du présent + énergie pour une nouvelle étape.

-      refus du passé + désir de vivre = nouvelle renaissance, avec ses risques.

-       ne pas être déjà amoureux.

Le « coup de foudre » : devenir amoureux à l’improviste, de quelqu’un que nous n’avions jamais vu auparavant, OU seulement un moment du processus ? Lorsqu’on accepte d’abandonner nos défenses ? Avec des yeux neufs. Tout énamourement est un processus imprévu et imprévisible.

 

Dans « Je t’aime » ; tout sur la passion amoureuse, de Francesco ALBERONI + sur la construction du couple.

 

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                                                      MYTHE D’ARISTOPHANE

 

« Jadis notre nature n’était pas ce qu’elle est à présent, elle était bien différente (…) chaque homme était dans son ensemble de forme ronde (…) ils tentèrent d’escalader le ciel pour combattre les dieux. Alors Zeus délibéra avec les autres dieux sur le parti à prendre. Le cas était embarrassant : ils ne pouvaient se décider à tuer les hommes et à détruire la race humaine à coups de tonnerre, comme ils avaient tué les géants ; car c’était anéantir les hommages et le culte que les hommes rendent aux dieux ; d’un autre côté, ils ne pouvaient non plus tolérer leur insolence. Enfin Zeus ayant trouvé, non sans peine, un expédient, prit la parole : « Je crois, dit-il, tenir le moyen de conserver les hommes tout en mettant un terme à leur licence : c’est de les rendre plus faibles. Je vais immédiatement les couper en deux l’un après l’autre ; nous obtiendrons ainsi d’eux davantage, puisqu’ils seront plus nombreux. Ils marcheront droit sur leurs deux jambes. S’ils continuent à se montrer insolents et ne veulent pas se tenir en repos, je les couperai encore une fois en deux, et les réduirai à marcher sur une jambe à cloche-pied. » Ayant ainsi parlé, il coupa les hommes en deux (…) Or, quand le corps eut été ainsi divisé, chacun, regrettant sa moitié, allait à elle ; et s’embrassant et s’enlaçant les uns les autres avec le désir de se fondre ensemble, les hommes mourraient de faim et d’inaction, parce qu’ils ne voulaient rien faire les uns sans les autres ; et quand une moitié était morte et que l’autre survivait, celle-ci en cherchait une autre et s’enlaçait à elle, soit que ce fût une moitié de femme entière – ce qu’on appelle une femme aujourd’hui -, soit que ce fût une moitié d’homme et la race s’éteignait. Alors Zeus, touché de pitié, imagine un autre expédient : il transpose les organes de la génération sur le devant (…) et par là fit que les hommes engendrèrent les uns dans les autres, c’est-à-dire le mâle dans la femelle. Cette disposition était à deux fins : si l’étreinte avait lieu entre un homme et une femme, ils enfanteraient pour perpétuer la race, et, si elle avait lieu entre un mâle et un mâle, la satiété les séparerait pour un temps, ils se mettraient au travail et pourvoiraient à tous les besoins de l’existence. C’est de ce moment que date l’amour inné des hommes les uns pour les autres : l’amour recompose l’antique nature, s’efforce de fondre deux êtres en un seul et de guérir la nature humaine. Chacun de nous est donc comme une tessère d’hospitalité (symbole)*, puisque nous avons été coupés comme des soles* et que d’un nous sommes devenus deux ; aussi chacun cherche sa propre moitié (symbole). »

                                                                        Le Banquet   PLATON

  • grec sumbolon, traduit ici par le nom de l’objet utilisé comme signe de reconnaissance entre un étranger et son hôte. Les Grecs utilisaient pour se reconnaître les deux moitiés brisées d’un quelconque tesson, dont les moitiés une fois rapportées l’une à l’autre devaient coïncider selon la coupure.
  • Ou carrelet, sans doute parce que ces poissons plats, que l’o, coupe pour lever les filets, ont une couleur de peau différente de chaque côté.

 

 

« Quand un homme, qu’il soit porté pour les garçons ou pour les femmes, rencontre celui-là même qui est sa moitié, c’est un prodige que les transports de tendresse, de confiance et d’amour dont ils sont saisis ; ils ne voudraient plus se séparer, ne fût-ce qu’un instant. Et voilà les gens qui passent toute leur vie ensemble, sans pouvoir dire d’ailleurs ce qu’ils attendent l’un de l’autre ; car il ne semble pas que ce soit le plaisir des sens qui leur fasse trouver tant de charme dans la compagnie de l’autre. Il est évident que leur âme à tous deux désire autre chose, qu’elle ne peut pas dire, mais qu’elle devine et laisse deviner ; (…)

Si, pendant qu’ils sont couchés ensemble, Héphaïstos* leur apparaissait avec ses outils, et leur disait : « Hommes, que désirez-vous l’un de l’autre ? » et si, les voyant embarrassés, il continuait : »L’objet de vos vœux n’est-il pas de vous rapprocher autant que possible l’un de l’autre, au point de ne vous quitter ni nuit ni jour ? Si c’est là ce que vous désirez, je vais vous fondre et vous souder ensemble, de sorte que de deux vous ne fassiez plus qu’un et qu’après votre mort, là-bas, chez Hadès*, vous ne soyez pas deux, mais un seul, étant morts d’une commune mort. Voyez si c’est là ce que vous désirez, et si en l’obtenant vous serez satisfaits. » A une telle demande nous savons bien qu’aucun d’eux ne dirait non et ne témoignerait qu’il veut autre chose : il croirait tout bonnement qu’il vient d’entendre exprimer ce qu’il désirait depuis longtemps, c’est-à-dire de se réunir et de se fondre avec l’objet aimé et de ne plus faire qu’un au lieu de deux.

Et la raison en est que notre ancienne nature était telle et que nous étionsun tout complet : c’est le désir et la poursuite de ce tout qui s’appelle l’amour. »

                                                          Le Banquet   PLATON

  • Dieu grec du feu et des métaux, qui fabrique les armes des dieux.
  • Dieu grec des morts, qui règne aux Enfers.

 

 

« Maintenant, comme fils de Poros et de Pénia, voici quel fut son partage. D’un côté, il est toujours pauvre, et non pas délicat et beau comme la plupart des gens se l’imaginent, mais maigre, défait, sans chaussure, sans domicile, point d’autre lit que la terre, point de couverture, couchant à la belle étoile auprès des portes et dans les rues, enfin, en digne fils de sa mère, toujours misérable. D’un autre côté, suivant le naturel de son père, il est toujours à la piste de ce qui est beau et bon ; il  est mâle, entreprenant, robuste, chasseur habile, sans cesse combinant quelque artifice, jaloux de savoir et mettant tout en œuvre pour y parvenir, passant toute sa vie à philosopher, enchanteur, magicien, sophiste. (…)

Sa nature n’est ni d’un immortel, ni d’un mortel : mais tour à tour, dans la même journée, il est florissant, plein de vie, tant que tout abonde chez lui ; puis il s’en va mourant, puis il revit encore, grâce à ce qu’il tient de son père. Tout ce qu’il acquiert lui échappe sans cesse : de sorte que l’Amour n’est jamais ni absolument opulent ni absolument misérable ; de même qu’entre la sagesse et l’ignorance, il reste sur la limite, et voici pourquoi : aucun dieu ne philosophe et ne songe à devenir sage, attendu qu’il l’est déjà. ; et en général, quiconque est sage n’a pas besoin de philosopher. Autant dirons-nous des ignorants : ils ne sauraient philosopher ni vouloir devenir sages : l’ignorance a précisément l’inconvénient de rendre contents d’eux-mêmes des gens qui ne sont cependant ni beaux, no bons, ni sages ; car enfin nul ne désire les choses dont il ne se croit point dépourvu. »

                                                            Le Banquet   PLATON

 

 

                                                                                                              MADAME DE WARENS

 

« Le coup d’œil de notre première entrevue fut le seul moment vraiment passionné qu’elle m’ait jamais fait sentir ; encore ce premier moment fut-il l’ouvrage de la surprise. Mes regards indiscrets n’allaient jamais furetant sous son mouchoir*, quoiqu’un embonpoint mal caché dans cette place eût bien pu les y attirer. Je n’avais ni transports ni désirs auprès d’elle : j’étais dans un calme ravissant, jouissant sans savoir de quoi. J’aurais ainsi passé ma vie et l’éternité même sans m’ennuyer un instant. (…) Enivré du charme de vivre auprès d’elle, du désir ardent d’y passer mes jours, absente ou présente je voyais toujours en elle une tendre mère, une sœur chérie, une délicieuse amie, et rien de plus. Je la voyais toujours ainsi, toujours la même, et ne voyais jamais qu’elle. Son image toujours présente à mon cœur n’y laissait place à nulle autre ; elle était pour moi la seule femme qui fût au monde, et l’extrême douceur des sentiments qu’elle m’inspirait ne laissant pas à mes sens le temps de s’éveiller pour d’autres, me garantissait d’elle et de tout son sexe. En un mot, j’étais sage parce que je l’aimais. Sur ces effets que je rends mal, dise qui pourra de quelle espèce était mon attachement pour elle. »

                                                             Les Confessions   ROUSSEAU

  • Il s’agit du « mouchoir de gorge »n destiné à cacher le décolleté.

 

 

 

 

« L’amour, pour l’ordinaire, est peu fait à ces lois,

Et l’on voit les amants vanter toujours leur choix ;

Jamais leur passion n’y voit rien de blâmable,

Et dans l’objet aimé tout leur devient aimable ;

Ils comptent les défauts pour des perfections,

Et savent y donner de favorables noms.

La pâle est aux jasmins en blancheur comparable ;

La noire à faire peur, une brune adorable ;

La maigre a de la taille et de la liberté ;

La grasse est dans son port pleine de majesté ;

La malpropre sur soi, de peu d’attraits chargée,

Est mise sous le nom de beauté négligée ;

La géante paraît une déesse aux yeux ;

La naine, un abrégé des merveilles des cieux ;

L’orgueilleuse a le cœur digne d’une couronne ;

La fourbe a de l’esprit, la sotte est toute bonne ;

La trop grande parleuse est d’agréable humeur, et la muette garde une honnête pudeur ;

C’est ainsi qu »un amant dont l’ardeur est extrême

Aime jusqu’aux défauts des personnes qu’il aime. »

                                                     Le Misanthrope   MOLIERE

 

 

Dans L’Amour, textes choisis et présentés par Eric BLONDEL, Corpus GF.

 

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« La vertu ne trouve plus créance aujourd’hui, sa force d’attraction a disparu ; à moins que quelqu’un s’entende à la remettre sur le marché comme une forme inusitée de l’aventure et du libertinage. »

« On a enseigné à mépriser les tout premiers instincts de la vie ; on a imaginé par le mensonge l’existence d’une « âme », d’un « esprit » pour ruiner le corps ; dans les conditions premières de la vie, dans la sexualité, on a enseigné à voir quelque chose d’impur. »

« L’élément corporel donne la prise avec laquelle on peut saisir le spirituel. »

« Ne pas s’attarder à une personne, fût-elle la plus aimée -, toute personne est une prison et aussi un refuge. »

« L’amour d’un seul être est une barbarie car on le pratique aux dépens de tous les autres (…) »

« Es-tu quelqu’un qui de vouloir un enfant ait le droit ? »

« Il existe de singulières abeilles humaines qui, dans le calice de toutes choses, ne savent toujours puiser que ce qu’il y a de plus amer et de plus fâcheux ; - et, en effet, toutes choses portent en elles un rien de cet antimiel ; Que ces abeilles humaines pensent donc du bonheur de notre époque tout ce qu’elles voudront, et continuent à bâtir la ruche de leur déplaisir. »

« D’abord apprenez à aimer. »                        NIETZSCHE

 

Dans Théorie du corps amoureux de Michel ONFRAY.

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Et surtout, « en vrac », et de diverses « qualités » :

Derniers poèmes d’amour de Paul ELUARD.

Les liaisons dangereuses de Choderlos de LACLO

L’écume des jours,

L’arrache-cœur de Boris VIAN.

Vingt-quatre heures de la vie d’une femme de S. SWEIG.

Mes nuits sont plus belles que vos jours de Raphaelle BILLETDOUX.

Les tambours du monde,

L’Enthousiasme de Daniel RONDEAU.

Le mépris,

L’ennui de MORAVIA.

Lolita de NABOKOV.

Ensemble, c’est tout d’Anna GAVALDA.

 

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